Et voici venir 2018.
Bien entendu, je profite de cette occasion pour souhaiter à tous les lecteurs de l’Institut des Libertés tous les bonheurs et les succès qu’ils méritent ainsi que ceux qu’ils ne méritent pas plus que cela. En ce qui me concerne, je ne sais pas trop où j’en serai si je n’avais obtenu dans la vie que ce que je méritais et je serais sans doute obligé de revenir à la définition de Pierre Dac de ce qu’est un homme libre : « parti de rien pour arriver nulle part » …
Je vous souhaite donc mes meilleurs vœux.
Hélas, j’imagine que tous les lecteurs vont me demander de préciser ce qui nous attend en 2018.
Ma réponse va être particulièrement claire : A la différence de la quasi-totalité des économistes, j’essaie de ne jamais faire de prévision puisque par définition le futur est inconnaissable et le restera toujours.
Je n’aime pas trop avoir l’air idiot et les marchés financiers à l’évidence ont été créés pour que le maximum de gens ait l’air idiot un maximum de temps et ils remplissent ces fonctions à la satisfaction générale. Je n’ai pas besoin de faire des prévisions pour ajouter à mon sentiment d’incompétence.
Et donc à la question : que va-t-il se passer en 2018, je réponds sans la moindre hésitation : je n’en ai pas la moindre idée et je soutiens que ceux qui en ont une sont au mieux des jean- foutre et au pire des charlatans (type même d’une proposition non exclusive pour ceux qui s’intéressent à la logique). Ce point étant acquis, à quoi peut donc bien servir un économiste qui refuse de faire des prévisions mais s’intéresse aux marchés financiers ?
Voici ma réponse : il peut aider à mettre en relation la notion de « valeur » de tel ou tel actif avec des futurs probables (mais non certains). Et cette mise en perspective peut aider le lecteur à structurer ses actifs d’une façon qui ne sera jamais certaine mais doit toujours rester rationnelle de façon à éviter dans la mesure du possible les grosses gamelles.
Pour mieux faire comprendre ce que je veux dire par là, je vais décrire ce que je sais aujourd’hui (ou que je crois savoir), ce qui n’est pas du domaine de la prévision mais d’un robuste travail. Et cette connaissance, je vais essayer de l’utiliser pour construire un portefeuille qui à aucun moment ne fera appel à la moindre prévision.
Commençons par les monnaies.
Je sais de façon quasiment certaine que le Yen est grotesquement sous-évalué. Pour les spécialistes cette sous-évaluation atteint environ 25 % en termes de parité des pouvoirs d’achat (voir l’article sur ce site expliquant ce concept). Historiquement, une monnaie retourne toujours à sa parité des pouvoirs d’achats (PPA), mais on ne sait jamais quand. En pratique, il faut en général entre trois ou cinq ans. Et donc si j’achète du Yen à partir de l’Euro aujourd’hui je devrais faire entre 4 % et 7 % par an sur cette position dans les années qui viennent année après année. Est-ce certain ? Absolument pas. Est-ce probable ? Oui, avec un taux de confiance de 90 %, ce qui est bien. Le Yen va-t-il baisser en 2018 en dessous du niveau où il est aujourd’hui contre l’Euro ? Peut-être. Mais il y a longtemps que j’ai renoncé à l’idée d’acheter le jour du plus bas.
Venons-en aux autres monnaies dans lesquelles je peux me mettre en cash. Commençons par la monnaie Chinoise qui cherche de plus en plus à devenir la monnaie du commerce inter- asiatique. En avoir me parait être une bonne idée, mais elle n’est pas aussi attrayante qu’elle ne l’était il y a deux ans ou que les monnaies Russe ou Britannique aujourd’hui.
Et donc, si j’étais français, j’aurais mes positions « cash » en yen, en livre britannique et accessoirement en rouble russe et en Yuan, et ces positions logiques ne sont en rien le résultat d’une quelconque prévision mais simplement de constatations logiques.
Si je prends un horizon à trois ans, je devrais avoir une rentabilité moyenne d’environ 5 % par an sur cette partie du portefeuille, qui restera très liquide et me permettra d’intervenir sur les marchés des actions ou des obligations si un drame s’y produisait. Par exemple, si un tel drame avait lieu, le yen monterait très violemment puisqu’il monte toujours pendant les crises financières.
Venons-en aux marchés obligataires.
· Le marché allemand et tous ses satellites (France, Hollande, Italie, Espagne etc…) n’ont aucun intérêt puisque je sais que les prix y sont tous faux, manipulés qu’ils sont par la BCE. Que des coups à prendre, à éviter donc et pour ceux qui en ont, à vendre toutes affaires cessantes.
· Les marchés européens non euro (Suisse, Suède, Grande-Bretagne etc…) ont peu ou prou suivi l’exemple de la BCE et je n’ai guère envie d’en acheter, il n’y là aucune « valeur » évidente.
· Les obligations US en dollars ? Voila qui est un peu mieux et je pourrai m’acheter des T bonds à 7 ans par exemple, mais je prends un risque de change vis-à-vis de l’euro et couvrir la position de change me bouffe tous mes intérêts.
· Et donc je me retrouve en train de m’acheter des obligations Indiennes, Russes, Indonésiennes, Chinoises qui me donnent entre 4 % et 8 % par an, dans des monnaies qui risquent de monter dans le futur. Pour ceux qui ne peuvent pas le faire, je remplacerai cette part du portefeuille obligataire obligataire par du cash en yen et en livre sterling.
· Cette partie du portefeuille devrait me donner un peu plus que le rendement immédiat des obligations que j’ai choisi, c’est-à-dire environ 7 % par an.
Venons-en aux actions.
La question à mille dollars aujourd’hui est à l’évidence : les actions vont-elles se casser la figure en 2018 ? Ma réponse sera la réponse habituelle : je n’en ai pas la moindre idée.
Mais je peux faire une confidence au lecteur. Dans ma vie professionnelle, j’ai trouvé beaucoup de règles qui me disaient que les actions, à certains moments comme en 2009, n’étaient pas chères et qu’il fallait en acheter.
Je n’ai jamais trouvé une règle qui me disait que les actions étaient chères et qu’il fallait les vendre toutes affaires cessantes, jamais. Ce n’est pas parce que le marché est « cher » aujourd’hui qu’il ne va pas doubler dans les douze mois qui viennent… c’est ainsi.
Armé de cette absence de connaissance où devrais-je aujourd’hui déployer mon capital-actions ? La réponse est : là ou les actions ne sont pas chères, c’est à dire au Japon, en Asie en Grande- Bretagne et au cas par cas ailleurs en fonction d’une analyse financière classique.
Est-ce que j’utiliserai des ETF ?
Jamais de la vie
Est-ce que l’indexation est une solution ?
Certainement pas !
Ces deux techniques font l’hypothèse que les marchés vont rester ouverts et cotés en continus.
J’ai connu nombre de cas dans ma vie professionnelle où les marchés sont restés fermés et/ou quand ils ont ouvert, ils ont ouvert en baisse de 25 % sur la veille, ce qui veut dire que toutes les positions en levier ou synthétiques ont été détruites en moins d’une journée.
Si vous êtes en actions, ayez des actions et c’est tout.
Pas d’emprunts, pas de produits mathématiques, pas de hedges, pas de complications, pas de boites noires.
Si je me concentre sur le Japon, l’Asie et quelques valeurs pétrolières (pour leur dividende), je peux espérer environ 8 % sur les 12 prochains mois, sauf s’il y a un krach important en Europe ou aux USA, auquel cas les deux autres parties de mon portefeuille feraient beaucoup mieux que ce que j’ai indiqué plus haut.
Grosso modo, ce portefeuille, fort bien diversifié et très défensif devrait me rapporter environ 7 % sur les 12 mois qui viennent, ce qui est nettement mieux que les 0.8 % que me rapportent les obligations françaises.
Dans le meilleur des cas (forte baisse ou éclatement de l’euro) je ferai 20 % ou plus.
Dans le pire des cas (hausse de l’euro, krach des actions) je tournerai aux alentours de zéro, ce qui sera mieux que la plupart des indices.
Encore une fois, je suis arrivé à ce résultat sans faire aucune prévision et pour une raison toute simple : faire des prévisions ne sert à RIEN.
Et écouter ceux qui les font n’est qu’une perte de temps. Le but est de comprendre pour agir et non pas d’agir parce que quelqu’un a vu quelque chose dans sa boule de cristal. Et si vous ne comprenez pas, vous ne jouez pas.
N’oubliez jamais que le « cash » à certains moments du cycle est précieux et que ces moments coïncident souvent avec des périodes où la banque centrale US retire de la liquidité des marchés, ce qu’elle a commencé à faire…
En conclusion et pour ceux qui pensent que certains sont capables de prévoir, je ne saurai trop recommander la lecture d’un classique de la sociologie moderne : « Le Devin », de Goscinny et Uderzo, dans la collection Astérix chez Dargaud.
Voilà qui est beaucoup plus instructif sur les ressorts de l’âme humaine que bien des livres qui se veulent beaucoup plus sérieux.
Et dans cette optique, je ne saurai trop conseiller en cette période de fêtes ou il est d’usage de recommander une liste de classiques propres à forger le caractère des citoyens deux autres chefs d’œuvre :
Le « Nid des Marsupilami » de Franklin, pour ceux qui voudraient savoir ce qu’être père signifie dans la réalité
Le « Schtroumpfissime » de Peyo, pour ceux qui veulent comprendre la Constitution de la V -ème République, sauf qu’à la fin de Gaulle ne revient pas.
Rien à ajouter à ces trois œuvres immortelles qui font la gloire de la Culture Francophone. Je n’ose dire française puisque d’abord, elle n’existe pas nous a dit notre Président et qu’ensuite, deux de ces auteurs sur trois sont Belges. Mais après tout Marguerite Yourcenar aussi était Belge et a été la première femme élue à l’Académie Française.
Bonne année à tous et bonnes lectures.
Le 1 Janvier, l’IDL entend respecter la trêve des confiseurs et rien ne sera publié ce jour-là, sauf bien sur si je venais à changer d’avis, ce qui me parait peu probable.
Bonne année à tous.