Par Jean-Jacques Netter
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Notre système de retraite par répartition est en faillite, mais il est aussi opaque et fonctionne comme un système « à la Madoff ». On promet des retraites qu’on ne pourra pas honorer. C’est un système injuste et intenable pour les raisons suivantes :
Nous sommes partis pour au moins dix ans de croissance molle. Il faut se préparer à la répression financière de l’Etat, c’est-à-dire la captation par l’Etat de l’épargne des ménages et des retraités.
Les caisses de retraite ne pourront pas servir les retraites promises
Les taux négatifs continuent a provoquer des comportements atypiques. Un fonds de pension canadien vient d’émettre de la dette à 100%, car il espère la racheter progressivement dans le marché à 95% ! Dans un monde logique, dans lequel nous ne sommes plus depuis des années, cela revient à considérer que la dette est devenue un actif comme un autre. Rappelons que pour une banque centrale, pratiquer des taux négatifs revient à estimer que le futur est plus certains que le présent. En effet, tout le monde a appris que le taux d’intérêt était la rémunération que l’on accordait à celui qui prêtait pour le compenser des incertitudes de l’avenir…
Tous les fonds de pension sont en risque. Ils sont confrontés au problème qui consiste aujourd’hui à trouver des actifs qui leur procureront du rendement et leur permettront d’assurer le service des pensions qu’ils se sont engagés à verser aux retraités qui ont cotisé toute leur vie. Pour en trouver, ils ont tendance à prendre de plus en plus de risques puisque les obligations souveraines émises par les états sont devenues des actifs extrêmement risqués. On connaît malheureusement la fin du film…
Les caisses de retraite du secteur privé en France fonctionnent le selon le principe de la répartition. Elles sont confrontées au même problème. Les taux zéro dévastent la rentabilité de leur portefeuille. Réglementairement, elles ne peuvent pour la grande majorité de leurs placements n’acheter que des obligations souveraines, censées être l’actif sans risque. Ce phénomène se cumule avec l’évolution démographique qui dégrade en permanence le rapport cotisant/retraité. Il n’y a vraiment que Marisol Touraine ministre des affaires sociales et de la santé, pour considérer que le régime des retraites est sauvé.
Les caisses de retraite du secteur public sont alimentées par le budget de l’Etat et ne font donc l’objet d’aucune provision digne de ce nom. L’Etat va continuer à verser près de 40Md€ par an pour financer les retraites des fonctionnaires, soit pratiquement la moitié des recettes de l’impôt sur le revenu ou pas loin du budget du ministère de la défense. Les cotisations ne financent qu’une pension sur quatre contre plus de huit sur dix dans le privé. Pour l’Ircantec, le système de retraite des fonctionnaires le taux de cotisation est de 5,63% contre 9,50% pour l’Agirc-Arrco, les salariés du privé.
L’Etat employeur comble donc la différence, ce qui représente un gouffre pour les contribuables. Même si « cela ne coûte rien puisque c’est l’Etat qui paye » comme l’a dit François Hollande, cela ne pourra pas encore fonctionner très longtemps sur ce rythme. Le petit problème, c’est que le niveau d’endettement de l’Etat avant la prise en compte de tous ces engagements approche déjà dangereusement les 100% du PIB.
L’euthanasie du rentier est en marche.
Les régimes spéciaux comme ceux d’EDF et GDF, pompent discrètement de l’argent, avec la complicité de l’Etat, dans la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse (CNAV) qui est la caisse des salariés du privé.
Les affiliés bénéficient de privilèges exorbitants comme le calcul de la pension sur les 6 derniers mois de traitement, la garantie du montant de la pension, le départ dès 50 ou 55 ans pour près de 94% des agents, la réforme reportant l’âge de départ à 52 ou 57 ans ne recevra un début d’exécution qu’à partir de 2017. Ce n’est pas tout, ils profitent également de bonifications d’annuités. Alors que le commun des salariés a besoin de plus de 40 annuités pour valider une carrière complète, les centaines de milliers de fonctionnaires accèdent au taux plein en n’ayant côtisé que 35 voire 30 annuités. En clair ils gagnent des années gratuites pour leur retraite sans avoir travaillé pour les obtenir.
On va donc, comme d’habitude, demander aux salariés du privé de faire de plus en plus de sacrifices pour préserver les régimes spéciaux. Pour y parvenir, des syndicalistes des régimes spéciaux sont entrés dans le conseil d’administration de la CNAV ! Rappelons que les syndicats sont sans légitimité avec 8% d’adhérents de la population active. Cela ne les a pas empêché de devenir des puissances financières perméables à la corruption et faisant obstacle aux réformes d’intérêt général. Leurs nombreux défilés contre la réforme des retraites ont montré qu’ils défendaient les corporatismes d’un autre siècle…
L’euthanasie du rentier est en marche. Depuis 2012, un tsunami de taxes s’abat sur les retraités : hausse des droits de succession, hausse des droits sur les donations, hausse des prélèvements sociaux sur les assurances vie, taxation des retraites d’entreprises. D’autres projets sont dans les cartons comme : la création d’une nouvelle taxe sur les retraites dont le doublement est déjà prévu, la surfiscalisation des produits d’épargne. Au lieu de s’en prendre aux retraités qui ont travaillé toute leur vie, l’Etat devrait commencer par supprimer les régimes spéciaux publics…
Les gouvernements ont toujours la tentation de financer les retraites par une taxe supplémentaire sur les hauts revenus et les revenus du capital. Mais en quoi les « riches » sont-ils concernés par les retraites ? Ils ont déjà payé les impôts les plus lourds du monde, l’ISF, les tranches supérieures de l’impôt progressif sur le revenu, l’impôt sur les sociétés, la CSG et la CRDS, la TVA sur leurs consommations, l’IRPP, les taxes sur les héritages et les donations, les taxes sur les plus values du capital, etc., ainsi, bien entendu, leurs propres cotisations sociales. Pourquoi leur demander un impôt supplémentaire, à eux spécifiquement ? Pour les socialistes, la réponse est simple. Il faut faire rendre gorge aux « riches » parce que le simple fait qu’ils soient riches est injuste. Les « riches » sont ceux qui se sont montrés capables de fonder et de faire vivre une entreprise ou qui ont eu un talent hors pair dans un domaine. Ce faisant, ils ont contribué à développer l’activité, l’innovation et la productivité, ils ont été un des principaux moteurs du progrès général.
La France est en train de devenir une fabrique de pauvres
L’assurance vie a été plébiscitée par les français qui ont bien compris que l’avenir de leurs retraites était menacé. Pour des raisons idéologiques, les régimes politiques qui se sont succédés ont refusé d’accorder aux Français la retraite par capitalisation dont bénéficient pourtant des pays comme la Suède. Sous la pression des circonstances, un succédané s’est mis en place sous la forme de l’assurance vie. Malheureusement, le système fiscal favorise l’achat d’obligations d’État. Cela conduit au tour de passe-passe suivant : les français sortent d’un système qui va faire faillite pour des raisons démographiques et y retournent aussitôt en achetant des obligations de ce même système.