La situation est désespérée mais pas sérieuse (Winston Churchill).
A la suite de ma chronique consacrée à l’Italie la semaine dernière, beaucoup d’entre vous m’ont demandé d’analyser la situation française en utilisant la même méthode, ce que je vais faire, en commençant par une citation que j’aime beaucoup et qui figure en exergue de ce nouveau papier.
- La situation est désespérée… si nous continuons sur les politiques actuelles
- Mais pas sérieuse… car si nous en changions, tout se remettrait en ordre tres rapidement.
Commençons par un état des lieux. Je suis un épargnant français aujourd’hui et le gouvernement français veut me faire investir en bourse de Paris. Méfiant, je demande à l’IDL d’indiquer ce que la bourse de Paris a réalisé comme performance depuis Janvier 2001 par rapport aux autres investissements que j’aurais pu faire à l’époque. Rappelons pour la petite histoire que l’indice de Paris, dividendes réinvestis, est montée de 3 % par an en moyenne de janvier 2001 à aujourd’hui. Ce qui compte cependant, c’est la performance relative par rapport aux autres actifs qu’il aurait pu acheter. Voici donc le résultat en performance relative (rentabilités totales, dividendes et intérêts réinvestis).
A l’évidence, investir en bourse à Paris a été une tres mauvaise idée depuis les débuts de l’Euro, puisqu’elle a sous-performé à peu près toutes les autres formes de placement, de quasiment 70 % pour l’or, de 43 % contre l’indice mondial , et d’environ 15 % pour les bourses européennes toujours libellées en monnaie nationales (Grande-Bretagne, Suisse, Suède, Danemark, Norvège, Pologne, Tchéquie…).Et comme la bourse a comme objet de mesurer la rentabilité marginale du capital investi dans un pays, cela veut dire en termes simples qu’il fallait être fou comme un lapin pour investir à Paris ou être entrepreneur en France.
Vérifions, en montrant la marge brute d’autofinancement des sociétés opérant en France, et par là je veux dire des sociétés qui produisent en France.
La ligne rouge est la marge brute d’autofinancement (le cash-flow en anglais) qui donne une indication de la rentabilité des sociétés opérant uniquement en France, ce qui exclue bien sûr toutes les sociétés ayant une capacité de production en dehors de France. La ligne bleue est le nombre total de chômeurs en millions, et attention : l’échelle à droite est inversée.
Ce graphique appelle deux remarques.
- Monsieur Trichet arrive à la Banque de France en 1993 et impose sa politique du franc fort. Depuis, la marge brute des sociétés, est passée de 25 % à 20 %, en pourcentage du PIB, et à chaque cycle, cette marge se retrouve plus basse qu’au plus bas du cycle précèdent. En Allemagne ou en Grande-Bretagne, cette marge n’exhibe aucune tendance baissière et est près de deux fois plus élevée.
- Quand la ligne rouge baisse, la ligne bleue se met à baisser six mois plus tard, ce qui veut dire que le chômage augmente. Quand les sociétés gagnent moins d’argent, elles embauchent moins, voire elles débauchent. Voilà encore une découverte stupéfiante à mettre au crédit de l’IDL. Et donc, compte tenu de l’immense gamelle que vient de prendre la ligne rouge, le nombre de chômeurs va exploser dans les six mois qui viennent de 750000 personnes au moins et cela est malheureusement une certitude.
L’étape suivante, que nous connaissons par cœur va être la suivante : Les « stabilisateurs automatiques » (allocations chômage, subventions directes et variées etc.) vont se mettre en route. Comme l’Etat a été incapable de se réformer pendant les années de vaches grasses, cela va déclencher une hausse du poids de l’État dans l’économie qui cette fois va passer très largement au-dessus de 60 % du PIB, ce qui va engendrer à son tour une baisse du niveau de vie et je suis donc à peu près certain que le PIB Français par habitant va baisser dans les 5 ans qui viennent.
Nous voilà dans la situation de l’Italie. La baisse du niveau de vie va commencer. A partir de maintenant et pour au moins les cinq ans qui viennent, ce niveau de vie ne va cesser de baisser année après année, cela est certain. La France va s’appauvrir. La réélection de monsieur Macron me parait tres compromise.
Ce qui m’amène à la question essentielle : Mais pourquoi l’économie française ne cesse-t-elle de s’enfoncer, et la France avec elle ? Et la réponse a cette question est très simple : parce que nous avons des dirigeants qui font passer leurs objectif politiques qui n’ont rien à voir avec la France avant le bien-être des français et le bien du pays. Leur but n’est pas que vous et moi soyons prospères et libres de gérer nos vies comme nous l’entendons, mais de créer un nouvel État européen auquel nous aurons abandonné toutes nos souverainetés juridiques, institutionnelles et surtout monétaires. Et si cela implique que nous soyons plus pauvres et plus asservis, tant pis, on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs.
Mais nous sommes les œufs et je ne vois toujours pas l’omelette.
Et cette politique ne peut pas réussir puisqu’elle est contradictoire dans son essence.
Il se trouve en effet que la France a 70 % de fonctionnaires de plus que l’Allemagne pour 10000 habitants, ce qui en tant qu’économiste m’indiffère totalement. Si c’est le prix à payer pour que les Français soient heureux de vivre ensemble, ce n’est pas un problème de nature économique mais de nature politique. Et pourtant, le coût du siège social France n’est « que » de 35 % plus élevé en France qu’en Allemagne (poids de l’État dans l’économie de 57 % contre 42 %), ce qui est moins que les 70 % auxquels on pouvait s’attendre. La raison ? Le travailleur français a une productivité supérieure à celle du travailleur allemand (ce qui n’est pas le cas de l’Italie) et réussit donc à rattraper par son efficacité hors norme la moitié de l’écart entre les couts des deux États, ce qui est déjà prodigieux. Il n’en reste pas moins que les entreprises françaises ont sur leur dos un jockey de 68 kilos tandis que les entreprises allemandes en ont un qui fait 50 kilos. Et devinez qui gagne la course ?
Dans le temps, avant l’euro, le franc baissait régulièrement de la différence du poids des jockeys ajustée de la différence de productivité, ce qui remettait les pendules à l’heure et protégeait la marge brute d’auto-financement de nos entreprises et donc l’emploi et les rentrées fiscales.
Mais depuis l’arrivée de l’Euro, tout cela est fini et la variable d’ajustement est maintenant la rentabilité des entreprises françaises. Du coup et en l’absence de tout régime imposé au jockey français, la marge brute baisse structurellement, la croissance structurelle aussi et les deux seules choses qui montent sont le poids de l’État et la taille de la dette.
CQFD.
Dans le fond, deux hommes ont détruit la France : Delors et sa rage de constituer un État Européen et Trichet et sa folie d’une monnaie forte. Et aucun des deux n’était élu pour mener ces politiques désastreuses et illogiques.
Car voilà la contradiction mortelle : On peut ne pas reformer l’État, on peut avoir un taux de change fixe avec l’Allemagne, mais on ne peut avoir les deux à la fois.
Et plus étrange encore, aucun des Présidents dument élus, Mitterrand, Chirac, Sarkozy, Hollande, ni bien sûr Macron n’ont cherché à renverser cette politique désastreuse. Jamais des élus n’ont autant trahi leurs électeurs.
Sont responsables du désastre donc, deux fous non élus, et cinq lâches qui, eux, avaient été élus, sans compter les députés et les sénateurs qui ont voté pour un Traité que les Français avaient refusé par referendum.
Mais de quoi ou de qui les lâches avaient-ils peur ?