par Edouard Husson 5 février 2025
Donald Trump aurait pu rester dans l’histoire comme le président américain qui avait arrêté le génocide de Gaza. En recevant Netanyahou à la Maison Blanche, il a confirmé les appréhensions des plus pessimistes: il ne diffère pas de Netanyahou sur l’objectif mais sur la méthode. Donald Trump préfère un nettoyage ethnique à un génocide. Cependant, il n’est pas sûr que le président américain se rende compte des forces hostiles qu’il déclenche.
Donald Trump a confirmé les craintes des plus pessimistes. Craig Murray résume parfaitement les enjeux:
Je me suis réveillé en entendant que Trump avait annoncé que les États-Unis annexeraient Gaza et que la population serait déportée. La Cisjordanie sera annexée le mois prochain par Israël.
Tout régime arabe qui s’y ralliera sera renversé. Il en résultera d’énormes troubles et des effusions de sang.
Les gouvernements sionistes d’Europe, qui ont la langue bien pendue, seront confrontés à un énorme dilemme. Ils devront faire face aux conséquences déstabilisantes de leur soutien au génocide.
« Il en résultera d’énormes troubles et des effusions de sang » me semble être la formule la plus décisive.
Trump déclenche des forces matérielles, et surtout spirituelles, qu’il ne pourra pas maîtriser
Je vais même plus loin que Craig Murray. Je parle ici en Chrétien formé par la lecture de Léon Bloy, de Charles Péguy, de Georges Bernanos. Il y a quelque chose d’apocalyptique, au sens plein du terme – la révélation de ce que les gens ont dans le cœur – dans l’annonce du président américain.
Il veut faire de la Terre Sainte la terre de Mammon, l’idole de l’argent. Comme si Gaza était « à vendre », cette terre de très ancienne implantation chrétienne, où la Sainte Famille s’est arrêtée au retour d’Egypte.
Donald Trump veut que des gens riches construisent des immeubles et des villas somptueuses là où des hommes, des femmes, des enfants, sont parqués depuis plus de sept décennies. Là où des dizaines de milliers de nos frères humains viennent d’être massacrés.
L’homme occidental est-il devenu si superficiel, si matérialiste, qu’il n’y ait même pas en lui un peu de crainte superstitieuse? L’argent éteint-il à ce point les consciences que des hommes et des femmes envisagent d’acheter ou de louer des appartements, de ripailler, de faire l’amour, de se baigner dans des piscines, de bronzer sur les plages, de danser, de faire du business sur des cadavres dont la terre n’a pas encore bu le sang?
Je connais bien des Chrétiens américains qui sincèrement pensent à la Terre Sainte en termes d’Apocalypse, au sens du dernier livre du Nouveau Testament. Mais se rendent-ils compte que si l’on veut parler en termes de Bien et de Mal, du Royaume de Dieu et de l’Antéchrist, leur président, leur pays est en train de basculer du mauvais côté?
J’entendais ce matin des prises de positions « sidérées » sur les ondes. Mais ce n’est pas de sidération dont nous avons besoin. C’est de lucidité. S’il existe encore quelque chose de la civilisation européenne, si pour nous la France a encore un sens, un avenir, nous devons nous lever pour dire NON au Palestinian Removal Act de Trump.
Nous devons cela aux Palestiniens. Nous devons cela à l’humanité. Nous devons cela à nos ancêtres, ces hommes et ces femmes qui nous ont transmis qu’on ne transgresse pas en vain les lois non écrites de l’humanité.