Avant-propos : Je suis avec attention ce qui se passe aux USA. Le cas échéant, je ferai une mise à jour lundi en huit. En attendant je passe sur Sud Radio dans « Bercoff dans tous ses états » Mardi 1 Décembre, pour parler de ce qui se passe aux USA.
Le premier Février 2021, je fêterai mes 50 ans de métier puisqu’en ce jour, en 1971, je m’asseyais à un bureau au 44 rue de Courcelles (siège de la banque de Suez). Et cela fait donc un demi-siècle que je me bats pour comprendre pourquoi ces foutus marchés passent leur temps à monter ou à baisser, et que je continue, passionné comme au premier jour, à essayer de comprendre. Et comme je ne m’attends pas à arriver à cent ans d’expérience (vers 2071), je me suis dit qu’il était temps pour moi d’exprimer mon admiration pour ces outils que je suis depuis si longtemps. Ces cinquante ans d’expérience m’ont en effet fourni une leçon : Les marchés reviennent naturellement à l’équilibre et sont une merveille d’intelligence collective. Je pourrais multiplier les exemples mais en voici trois qui vous permettront peut-être de gagner de l’argent sans travailler…
Premier exemple : l’or en tant que réserve de valeur.
Pendant des siècles l’or a rempli les trois fonctions de toute monnaie, réserve de valeur, moyen d’échange, étalon de valeur. Et puis, en 1971, l’or a cessé d’être une monnaie pour être remplacée par des monnaies fiduciaires ayant de la valeur parce que l’Etat qui les émettait disaient qu’elles avaient de la valeur. Mais l’or a-t-il cesse pour cela d’être une réserve de valeur ? Je n’en suis pas si sûr… Que le lecteur veuille bien considérer le graphique suivant que je trouve stupéfiant.
Au cours des cent dernières années, nous avons eu nombre de booms, de recessions, une dépression ou deux, des périodes où les prix baissaient, suivies par des périodes d’inflation, une guerre mondiale, la guerre froide, la décolonisation, la fin des taux de change fixe entre l’or et le dollar, la chute du communisme, la réunification de l’Allemagne et que sais-je encore et, en moyenne, les dividendes payés par le S&P ont permis d’acheter entre 1.5 g et 0.5 g d’or par an, la moyenne étant a 1g sans qu’il y ait la moindre tendance. Et nous sommes toujours revenu à la contre-valeur d’1g pour les dividendes, ou nous sommes aujourd’hui comme en 1920. C’est donc dire que depuis 1920, la valeur du dividende est montée exactement comme le cours de l’or.
Chaque épargnant a donc le choix quand il touche son dividende soit de le réinvestir dans le S&P 500, soit d’acheter un gramme d’or et la décision doit être prise en fonction :
- De la valeur relative des deux. Aujourd’hui neutre
- De la tendance a cinq ans du ratio au-dessus ou en dessous de la moyenne mobile, aujourd’hui favorable à l’or.
- De la politique des banques centrales : aujourd’hui favorable à l’or.
Deuxième exemple : Les marchés obligataires
Comparons les marchés des obligations gouvernementales à 10 ans pour la Suède et pour la France et calculons pour chacun d’entre eux la rentabilité total, c’est-à-dire après réinvestissements des coupons, les obligations restant à une duration moyenne de 10 ans.
Voici le résultat :
La rentabilité est la même depuis 1988, à peu de chose près, et il ne peut pas en être autrement. Les deux pays présentent le même risque et si l’un des deux pays se mettrait à rapporter plus que l’autre sur le long-terme, tous les capitaux iraient chez lui, les taux baisseraient, le taux de change monterait, son déficit extérieur se creuserait, ce qui ferait baisser la monnaie un peu plus tard, et le contraire chez le pays défavorisé. Et donc, se dit le lecteur, pourquoi me parler du marché obligataire suédois puisqu’il a la même rentabilité que le marché français ?
Tout simplement parce que celui qui est prêt à passer de l’un à l’autre quand le premier est surévalué et le second sous-évalué permet de faire croitre la rentabilité de son portefeuille obligataire. Ainsi celui qui a vendu ses obligations françaises fin 2019 pour acheter des obligations suédoises vient d’engranger un différentiel de près de 7 %, ce qui n’est pas mal quand les taux sont proches de zéro. Et il a une bonne chance de gagner encore 17 %, avant de renverser sa position. Bien entendu, cela ne fonctionne que si au moins l’un des taux de change est libre de fluctuer librement, sinon il n’y a pas de prix de marché et le retour a l’équilibre ne peut avoir lieu, ce qui amène à une dépression dans le pays dont la monnaie est et reste surévaluée (cf. la situation italienne en ce moment)
Troisième exemple : Taux de changes et parité des pouvoirs d’achat
Cette théorie stipule que les taux de change entre deux pays s’ajustent toujours sur le long-terme en fonction des différences d’inflation entre les deux pays.
Vérifions en comparant l’Allemagne et le Japon, deux grands pays industriels situés de part et d’autre de la planète.
La ligne à zéro est la parité des pouvoirs d’achat. La ligne noire est la déviation en pourcentage par rapport à la valeur théorique (échelle de gauche). La ligne rouge est le cours de change « de marché » entre les deux monnaies (nombre de yens par Euro, échelle de droite). Imaginons que le lecteur ait des positions « cash » importantes dont il veut maximiser la rentabilité sans augmenter son risque. Que peut-il faire ?
Le plus simple est de mettre son cash dans la monnaie la plus sous-évaluée pour peu qu’elle soit à plus d’un écart type de la ligne zéro (de part et d’autre de la bande rouge). Par exemple en 2000, il vend le yen (surévalué) aux alentours de 100 y par euro, pour les racheter en 2004 aux alentours de 130 y par euro. Ou encore en 2015, il vend l’euro a 130 y par euro pour les racheter quelques mois plus tard à 110.
Aujourd’hui, la livre est sous- évaluée par rapport à l’euro, mais bien sur personne ne veut acheter la Livre puisque tout le monde sait que la Livre va s’écrouler en sortant de l’Europe, ce qui est bien entendu une ânerie.
Mais va me dire le lecteur, si les marchés sont tellement efficaces, pourquoi sommes-nous dans un tel désastre ?
Hélas, la réponse est simple : Nous sommes gouvernés par des puissants cerveaux qui pensent qu’ils savent mieux que les marchés ce qui sera bon pour les économies et l’un des exemples les plus extraordinaires en a été l’Italie contre la Suède.
Que le lecteur en juge :
1980 à 1995, les deux pays étant dans le SME.
Les deux en sortent en 1992. La Suède refuse le taux de change fixe avec l’Allemagne, l’Italie l’accepte.
La Suède a donc eu depuis près trente ans des prix de marché pour son taux de change et l’Italie non. Les résultats sont flagrants : La Suède va tres bien, l’Italie s’écroule, et il ne peut pas en être autrement.
Conclusion, qui ne surprendra personne.
Les marchés reviennent toujours à l’équilibre, sauf si les banquiers centraux et /ou les hommes politiques décident d’intervenir. Quand ces puissants génies se laissent aller à des facéties tels que fixer les taux de change ou les taux d’intérêts, il faut partir d’une certitude : ils vont échouer puisque personne ne peut comprendre la totalité des mécanismes d’ajustement.
Il faut donc alors tristement réintroduire l’or dans ses portefeuilles, investir au maximum dans des pays qui restent raisonnables. Depuis un grand moment, je ne cesse de dire que la plupart de ces pays raisonnables sont en Asie, et les faits semblent confirmer cette analyse.
Et je signale à ceux qui auraient suivis mes conseils que le marché obligataire chinois a été le plus performant en une seule monnaie sur un an, deux ans, cinq ans et dix ans, et qu’à mon avis, ce n’est pas près de s’arrêter, tant nos marchés obligataires vont se casser la figure, tout simplement parce que leurs prix ont été manipulés par les génies mentionnés plus haut et que nous sommes loin, tres loin de l’équilibre entre l’Asie et le reste du monde