Si j’en crois la presse française, l’économie en Grande-Bretagne va mal, très mal, et cela serait dû à la décision de quitter ce havre de paix et de croissance que serait l’Europe, admirablement gérée par nos chères élites technocratiques comme chacun le sait. Nos médias expliquent ainsi que la croissance du PIB en Grande-Bretagne serait en train de s’effondrer. Il est vrai que les chiffres du dernier trimestre n’ont pas été bons. Ce que l’on ne vous dit pas, c’est que cet « effondrement » vient de la quasi-stagnation des dépenses de l’état depuis que les conservateurs sont revenus au pouvoir.
Admettons que 50 % du PIB dans un pays soit d’origine étatique et 50 % viennent du secteur privé. Si le secteur étatique cesse de croître, la moyenne des deux va baisser. Celui qui pense que cette baisse est une mauvaise nouvelle croit sans doute que l’Union soviétique a été un immense succès… De fait, depuis le retour des Conservateurs, le poids de l’état dans l’économie britannique a déjà baissé de 4 points de PIB, ce qui ne s’est jamais produit en France, mais est habituel quand la droite est au pouvoir en Grande-Bretagne.
Comment les conservateurs arrivent-ils à ce résultat miraculeux ? En faisant baisser les effectifs de la fonction publique à chaque fois quand ils sont élus, ce qui est socialement insupportable et ne peut amener qu’à une dépression comme chacun devrait le savoir.
Les conservateurs (ces monstres), à partir de 2004, ont viré 1 million de fonctionnaires ou assimilés (les effectifs de la fonction publique passent de 6.4 millions à 5.4 millions en quelques années, échelle de droite) et la loi dite de Charles Gave se vérifie une fois de plus : pour chaque fonctionnaire qui disparaît, trois emplois au moins sont créés par le secteur privé, les emplois du secteur privé passant de 21.5 millions à 24.5 millions pendant la même période. Notons de plus qu’il n’y a jamais autant de Britanniques au travail, 71% de la population contre 61 % en France et que le nombre d’emplois créés au Royaume-Uni a été plus de deux fois supérieur au nombre d’emplois créés en France depuis 2010…
Et comme la croissance du secteur privé est bonne, voilà qui favorise les rentrées fiscales… Et comme le maintien sous contrôle les dépenses de l’état restent très fort, à terme, le pays revient à l’équilibre budgétaire. En fait, d’après des chiffres préliminaires, il n’est pas impossible que le budget britannique repasse en excédant dès 2018. Personne n’en parle en France…
Et qu’en est-il du commerce extérieur ?
Hors zone euro, rien à signaler. En fait, la plus grosse partie du déficit extérieur vient de la zone euro, frappée de stagnation depuis au moins 10 ans et donc incapable d’importer des produits anglais… alors que les Britanniques importaient joyeusement des produits européens.
Conclusion
La Grande-Bretagne va bien et continuera à aller de mieux en mieux puisque les emplois sont de vrais emplois créés par le secteur marchand…
Et donc certainement, la bourse de Londres doit être au plus haut par rapport à la bourse de Paris…
Pas du tout ! Rarement la Grande-Bretagne a-t-elle été aussi bon marché par rapport à la France…
Le graphique montre que sur le long terne la rentabilité des deux marchés des actions représentant des pays similaires est la même. Il ne peut pas en être différemment puisque la rentabilité du capital investi entre deux pays converge automatiquement vers le même niveau, à condition bien sûr que le taux de change entre les deux ne soit pas bloqué.
Et donc, de temps en temps, il faut acheter le marché qui est trop bon marché et vendre celui qui est trop cher pour bénéficier d’un inévitable retour à la moyenne.
Aujourd’hui, il faut à l’évidence vendre la France et acheter la Grande-Bretagne …tout simplement parce que l’incertitude politique perçue est très grande au Royaume-Uni.
Ce qui m’amène à dire un petit mot sur la relation entre évènements politiques et résultats boursiers. Quand le FMI était à Londres en 1977, il fallait bien sûr acheter la Grande-Bretagne et vendre la France de Giscard, pour la racheter dès que Mitterrand fût élu. Quand Nixon est déposé fin 1974, il faut acheter et non pas vendre et vendre quand Carter est élu.
Il faut savoir acheter au son du canon et vendre au son des violons.
Dans le fond, la politique donne aux esprits paresseux une raison pour acheter au plus haut et vendre au plus bas.
La conclusion est simple : se laisser influencer par la presse, c’est être certain de voir son capital fondre comme neige au soleil.
Et comme toute la presse me dit que la situation politique en France est très stable (?) alors qu’elle serait très instable (?) en Grande-Bretagne, je me dis qu’il faut vendre la France et acheter la Grande-Bretagne toutes affaires cessantes puisque ces perceptions, qui ont de bonnes chances d’être fausses, sont certainement déjà prises en compte par les marchés.
Si les journalistes du Monde le savent, je ne vois pas qui pourrait l’ignorer.
Dans le fond, lire la presse est dangereux pour sa propre santé financière.